Dauphiné Libéré - 11/12/2009 - SAINT-ÉTIENNE-DE-SAINT-GEOIRS

    Rose Valland résiste à Lyon

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    "A Lyon, une exceptionnelle exposition sur l’œuvre de Rose Valland, héroïne de la guerre des arts en 39-45 est en cours. Née a Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs en 1898, elle y  a terminé ses jours. Le collège baptisé à son nom, immortalise sa mémoire.Cette exposition, remarquable par la densité émotionnelle et l'importance de ses ceuvres, se tient à Lyon du 3 décembre au 15 mai 2010.

    Elle est coproduite par la ville de Lyon, Le CHRD et l'association Rose Valland."


    Le MONDE - 05/12/2009

    Rose Valland, espionne au service de l'art

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    Une exposition à Lyon rend hommage à cette historienne de l'art grâce à laquelle on a pu récupérer une grande partie des chefs-d’œuvre pillés en France par les nazis. Le portrait d'une discrète attachée de conservation du Musée du Jeu de paume.

    Par MATTEA BATTAGLiA (extraits)

    Le 14 juin 1940, les Allemands occupent Paris, vidé de ses habitants. Le 17 juin, Pétain se dit prêt a signer l'armistice, conclu le 22. Retranchée dans les galeries désertées du Musée du Jeu de paume, non loin de l'arc de Triomphe où le drapeau à croix gammée vient d’être hissé, une femme assiste, impuissante, à l'arrivée des nazis. Rose Valland, 41 ans, est attachée de conservation au Jeu de paume.

    Pendant toute la durée de l'Occupation, cette passionnée d'histoire de l'art va etre la seule responsable française que les nazis toléreront dans l'enceinte du musée. Et l'un des rares témoins du forfait qui s'y déroule : le stockage des milliers d’œuvres d'art volées aux grandes familles juives. Certaines seront vendues sur le marché de l'art français, mais la majorité partira vers l'Allemagne.

    Durant quatre ans, Rose Valland va noter, consigner, archiver, parfois au péril de sa vie, toutes les informations sur les œuvres dérobées : noms, auteurs, destinataires... Après guerre, sa contribution est officiellement saluée par la France et les Alliés : Rose Valland compte parmi les femmes les plus décorées, cumulant entre 1946 et 1948 la Légion d'honneur, la médaille de la Résistance, la Medal of Freedom américaine... Et puis plus rien ou presque.

    Elle sombre quasiment dans l'oubli pendant un demi-siècle.

    C'est pour rompre ce silence qu'une poignée d'habitants de Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs, sa ville natale dans l'Isère, a fondé en 1997 l'association La Mémoire de Rose Valland. Émus par la retraite solitaire de leur concitoyenne et sa disparition discrète, le 18 septembre 1980 - «pas plus de sept ou huit personnes étaient présentes à son enterrement », témoigne Jacqueline Barthalay, la présidente de l'association - , ces fidèles d'entre les fidèles, anciens amis ou voisins, n'ont de cesse de rappeler, d'expositions en conférences, l'itinéraire singulier de Rose Valland.

    Née le le` novembre 1898, une vingtaine d'années après le vote des lois Jules Ferry sur l'école gratuite et obligatoire, la fille unique de François Paul, maréchal-ferrant, et de Rose Maria, sans profession, est un « modèle d'extension sociale par l'école », explique Emmanuelle Polack, commissaire de l’exposition qui vient de débuter à Lyon. Cette historienne a reconstitué, à l'occasion, le curriculum vitae de Rose Valland, édifiant : après l'école normale de Grenoble, la jeune femme et en 1919 l'école des beaux-arts de Lyon. En 1922, elle entre aux Beaux-Arts de Paris et en 1924, à l’École du Louvre. Elle soutient notamment une thèse sur les primitifs italiens. En 1932, à 34 ans, elle devient attachée de conservation au Jeu de paume, à titre bénévole. C'est là qu'elle contribue à mettre à l'abri les collections publiques d’œuvres d'art, au milieu des années 1930, lorsque le nazi se précise.

    CONTRE L'ART « DÉGÉNÉRÉ »

    Dès 1936, des châteaux, monastères et abbayes susceptibles de servir de refuge aux œuvres sont répertoriés dans l'ouest et le centre de la France. Si toute guerre fait redouter des destructions et des pillages, les craintes sont encore plus justifiées dans l’hypothèse d'un conflit avec le III' Reich. Avant même d'accéder à la chancellerie, le 30 janvier 1933, Hitler a développé, simultanément à ses thèses antisémites, une condamnation de l'art moderne dit « dégénéré ». Dans "Mein Kampf", écrit en 1924-1925, il attaque le cubisme, le futurisme, le dadaïsme... Dès 1933, le Bauhaus « expression la plus parfaite d'un art dégénéré », selon le ministre de la propagande Joseph Goebbels, est fermé par les nazis. De nombreux artistes se reconnaissant dans ce mouvement s'enfuient aux États-Unis.

    Hitler entend « purifier » l'art, le débarrasser de tout ce qui n'est pas figuratif. Le style n'est pas le seul critère de sélection : les œuvres de Pissarro sont rejetées parce qu'il est juif, Kollwitz parce qu'elle est socialiste...« En 1938, plus de 16 000 œuvres considérées comme "dégénérées sont retirées des musées allemands. En mars 1939, les nazis brulent 5 000 œuvres à Berlin », souligne Corinne Bouchoux, auteur de "Rose Valland. La Résistance au musée".

     Un autre danger guettera bientôt les collections publiques : la convoitise des dignitaires du Reich fascinés par les antiquités gréco-romaines, par les peintres flamands et hollandais notamment - Hitler en tête qui rêve de fonder à Linz, sa ville natale, le plus aryen des musées, mais aussi le maréchal Hermann Goering ou le ministre des affaires étrangères Joachim von Ribbentrop, deux collectionneurs compulsifs. Sans compter la rapacité des marchands d'art, allemands comme français, qui vont faire fortune en s'échangeant les biens confisqués aux juifs, aux francs-maçons et aux opposants politiques.

    w110002LES DÉBUTS de Rose Valland au Jeu de paume (ici avec son patron André Dézarrois) lors d'une exposition consacrée a José Fioravanti en 1934. Ce musée présente alors les « écoles étrangères contemporaines ». Il sera dédié aux impressionnistes à partir de 1947.


    LES ÉCHOS - 05/12/2009

    Le roman de Rose : EXPOSITION LA DAME DU JEU DE PAUME

    Au Centre d'histoire de la Résistance et de la déportation. Du 3 décembre 2009 au 2 mai 2010, 14, avenue Berthelot, 69007 Lyon.

    par Thierry Gandillot

    Pendant la guerre, Hermann Goering s'est rendu pas moins de vingt fois au musée du Jeu de paume afin de choisir parmi les tableaux pillés dans les grandes collections juives ceux qui allaient enrichir sa déja magnifique collection ou les cimaises du gigantesque musée qu' Hitler projetait de faire construire à Linz, en Autriche. Tétant son barreau de chaise, le chapeau posé en arrière sur la tête, le Reichmarschall ne remarquait certainement pas la modeste employée aux cheveux gris ramenés en chignon, qui scrutait, derrière ses petites lunettes cerclées, tout ce qui se tramait entre dignitaires nazis. Pourtant, cette discrète « attachée bénévole », nommée Rose Valland, allait jouer un rôle de premier plan dans l'histoire de l'art du XXE siècle. Jour après jour, en effet, elle notait les œuvres, leurs destinations, le nom de leur nouveau propriétaire, n'hésitant pas a aller fouiller dans les bureaux ou les corbeilles à papier afin de nourrir les notes qu'elle transmettait ensuite à la direction des Musées nationaux.

    Née en 1898, d'un père forgeron en Isère, Rosa Antonia Valland vient d'un milieu modeste. Elle bénéficie d'une bourse qui lui permet d'entrer a l'école normale d'institutrices de Grenoble. Puis elle fait des études d'art et d'archéologie aux Beaux-Arts de Paris, à l’École du Louvre ou à la Sorbonne. Pendant des années, elle organise des expositions, rédige des catalogues, écrit des critiques.

    Avant-guerre, elle participe à la vaste opération de mise à l'abri des principales œuvres d'art des musées français.

    « Rude et déterminée »

    A la fin du conflit, elle est naturellement nommée secrétaire de la Commission de récupération artistique. Capitaine dans l'armée française, elle est incorporée dans la septième armée américaine, chargée de la récupération des œuvres d'art en Allemagne. Son homologue américain, James J. Rorimer, la jugera « rude et déterminée ». En 1950, 60.000 œuvres d'art avaient été récupérées, dont 45.000 sont rendues à leurs propriétaires.

    C'est seulement en 1952 que Rose obtient le titre longtemps espéré de conservateur des musées nationaux. Dix ans plus tard, elle connaît une célébrité mondiale lorsque John Frankenheimer adapte son histoire à l'écran avec Burt Lancaster, Jeanne Moreau et Suzanne Flon dans son propre rôle. Une extraordinaire destinée que relate l'intéressante et émouvante exposition montée par Emmanuelle Polack au Centre d'histoire de la Résistance et de la déportation, dirigé par Isabelle Doré-Rivière à Lyon. On peut y découvrir des documents inédits comme ces photos de Goering et de son conseiller Bruno Lohse au Jeu de paume, le recueil des feuillets que Rose  faisait passer à la direction des Musées de France, des conservations radiophoniques, ou même ses premières peintures- un "portrait de femme au chapeau", une "Étude pour escabeau", ou le "Chevet de Notre-Dame de Paris.


    LE FIGARO - 04/12/2009

    Exposition « La dame du Jeu de paume »

    Rose Valland, qui sauva notre patrimoine pendant la guerre, est à l'honneur au Centre d'histoire de la Résistance à Lyon. L'avis du Figaro : *****


    L’HUMANITÉ - 04/12/2009

    ROSE VALLAND, une résistante au service du sauvetage des œuvres

    Une exposition à Lyon retrace pour la première fois la vie de Rose Valland, figure française de la Résistance pendant la Seconde Guerre mondiale, qui s'est retrouvée, depuis son poste au musée du Jeu de paume, au cœur du sauvetage des œuvres d'art menacées par les nazis. Ouverte au public jeudi, au Centre d'histoire de la résistance et de la déportation (CHRD) de Lyon, une référence sur le sujet en France, l'exposition est riche de dizaines de photos, lettres et notes clandestines, parfois inédites. « Figure de la résistance civile », selon Emmanuelle Polack, la commissaire de l'exposition, Rose Valland est entrée en 1932 comme attachée de conservation au musée du Jeu de paume; elle collabore, des 1936, au plan du gouvernement français destiné a mettre à l'abri les plus grandes œuvres des musées nationaux, en prévision d'un nouveau conflit mondial. Elle participe ainsi à l'opération d'exfiltration de la Joconde du Louvre pour le château de Chambord, le 28 aout 1939.

    Après la guerre, Rose Valland, qui reçoit le grade de capitaine beaux-arts a son entrée dans l'armée française, passe dix ans en Allemagne, en tant que secrétaire de la Commission de récupération artistique (CRA), afin de remettre la main sur ces trésors. L'exposition sur Rose Valland se poursuivra jusqu'au 2 mai 2010.

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    La "salle des martyrs " du Jeu de paume", accueille de 1940 à 1944, des Braques, Léger, Bonnard, etc..., des œuvres dégénérées que les nazis veulent échanger contre les tableaux classiques qu'ils convoitent .